Voilà en fait ce que captent les caméras : des individualités choisies au départ pour leurs egos sur-dimensionnés, et que la promiscuité forcée du Loft amènera peu à peu à s’exhiber, offrant le spectacle bien contemporain d’une multitude de Narcisses luttant pour le pactole suprême – bien plus que de l’argent – la popularité, la reconnaisance, une célébrité instantanée.
Une nouvelle forme d’intolérance déguisée derrière un humanisme de façade s’installe, nouvelle étape historique, d’autant plus difficile à démasquer qu’elle n’annonce plus aussi ouvertement sa barbarie. Faut-il craindre comme Charles Melman un fascisme volontaire, « non pas un fascisme imposé par quelque leader et quelque doctrine, mais une aspiration collective à l’établissement d’une autorité qui soulagerait de l’angoisse, qui viendrait enfin dire à nouveau ce qu’il faut et ce qu’il ne faut pas faire, ce qui est bon et ce qui ne l’est pas, alors qu’aujourd’hui on est dans la confusion.
Un dialogue, qui est moins une explication des choses qu’une sorte de fictivisation, une mise en récit du monde à l’intérieur de laquelle le téléspectateur pourra se projeter comme au milieu d’une fable exemplaire, dont la morale est toujours que son opinion vaut celles des autres.
C’est tout l’espace public représenté qui est en train de verser dans le second degré, ce niveau Méta qui fait instantanément du spectateur un complice dans l’éradication du sens et son remplacement par une sorte de cynisme branché, sans portée critique véritable mais porteur de tous les signes d’un détachement de bon ton qui en mime les effets.
Brèves éditoriales sur les médias, de 2001 à 2004. Observation des faits significatifs, absurdes ou inquiétants qui se manifestent dans la culture des médias de masse. 1ÈRE PARTIE (2003-2004).
Hors Champ s’associe de nouveau à la Cinémathèque québécoise pour présenter un programme composé de trois documents exceptionnels, dans lesquels des penseurs parmi les plus importants de notre temps précisent et élaborent leurs idées.
Archives des brèves éditoriales, 2e partie (2002).
La vidéo est de toute évidence le médium de notre époque et celui de notre culture. Au cours des trente dernières années elle a proliféré comme aucun autre médium dans le monde des arts (diffusion élargie dans les musées, galeries d’art et festivals de cinéma, intégration à tous les arts de la scène, à la culture techno, enseignements spécifiques dans les écoles d’art…), en plus d’être le support du média de masse qu’est la télévision. En tant que technologie de l’image, dans toutes ses variantes, son étendue est encore plus vaste ; caméras amateures, cinémas maison, documents corporatifs, Internet, surveillance… L’omniprésente possibilité de tout capter en images.
La dialectique nous a appris, écoliers, que le vrai est toujours un moment du faux, et le faux, non moins, un moment du vrai. Cette dialectique, à la fois se vérifie et se contredit, chaque jour, suivant l’angle d’attaque et la lucidité de l’observateur, depuis que le “monde-vérité” a migré vers un autre système solaire, depuis, aussi, que la vérité est passée du discours (écrit, parlé) aux images mécaniques.