Une fois de plus, dimanche, cette émission a fait l’étalage de l’insignifiance désolante dans laquelle notre télévision aime aujourd’hui à se complaire. Et peu importe si, pour cela, on somme le spectateur, voyeur et juge, de se mirer de semaine en semaine dans le miroir pourtant peu reluisant que lui renvoient des médias de plus en plus cyniques.
Lyrisch nitraat propose un parcours réflexif sur la disparition d’un art (un art de la disparition) : disparition du cinéma des premiers temps, disparition à laquelle sont voués les films, disparition de ceux et celles qui ont laissé l’indice de leur présence devant la caméra, disparition d’une position spectatorielle.
Autant le documentaire de Christlieb et Kijak se complaît dans le portrait de ces asociaux contemporains, de ces encyclopédies semi-autistes, déraciné des idées qui ont porté la cinéphilie des années 60, autant le film de Bertolucci est l’histoire de cette idée, de cet âge d’or de la cinéphilie parisienne, avant sa chute, entre l’Affaire Langlois et mai 68, où l’écran de cinéma se trouve enfin dépassé par la rue, la cohue, l’histoire.
La cinéphilie n’est plus ce qu’elle a été, certes, mais cesse-t-elle d’exister pour autant ? Une des façons de l’envisager, dès lors, serait de tenter d’en formuler une définition qui ne serait pas obscurcie par la nostalgie, qui témoignerait de façon juste de la relation du spectateur au film.
“Le cinéma, à mon sens, est mort en devenant un art de la maîtrise, dès le second film des frères Lumière. Le prolongement de cette forme morte de cinéma se trouve dans le virtuel. Le premier film des Frères Lumière quant à lui, se prolonge avec Rohmer, Kiarostami, les Straub et c’est une aventure folle.”
“…Quelle heure est-il là-bas ?, du réalisateur taiwanais Tsai Ming-Liang, s’affiche comme un film sur la mort du père. Le père du réalisateur est mort en 1992, et la mort du père de son acteur fétiche, Lee Keng-Shen, est survenue au cours du tournage de The Hole (1999). Son dernier film interroge et tente de surmonter la douleur que les deux hommes ont vécue, en proposant la chronique détournée d’une disparition par le biais d’une lente – bien que par moments hilarante – méditation sur le temps et la mort, sur le dépaysement et le retour, sur l’incommunicabilité et le hasard ?…”