J’ai beaucoup pensé à Lav Diaz cet été, sans doute pour avoir passé beaucoup de temps en sa compagnie, au mois de mai et juin. Et je trimballe ainsi depuis – comme cette « malle dans la tête » qui encombre, dont parle Proust — des liasses d’idées qu’il aurait fallu parvenir à colliger et organiser en un grand texte synthétique, qui se serait déplié en une vaste fresque composée et articulée, comme le sont chacun de ses films-monde. Plutôt, c’est quelque chose d’assez épars, de personnel, de trivial souvent, variant les focales et les échelles, les durées et l’esprit, qui s’est imposé. Des notes, encore.
Le texte ici proposé est tiré de l’expérience de l’atelier de recherche-création tenu l’été dernier à l’Université de Montréal sous l’aile d’André Habib et Pierre Hébert.
Il est étonnant (et heureux) de retrouver, flanqué au milieu d’une programmation de films plus ou moins imbéciles, plus ou moins réussis, l’un des films les plus accomplis de toute l’histoire du cinéma, et dont les nombreuses émules maladroites qu’il a générées (quelques-uns rodent à Fantasia, au FNC, au FFM) ne font que confirmer, par la négative, la grandeur et la caractère indépassable de son accomplissement.
Arrimant la technologie à une vision et une voix des plus personnelles, il incarne plus que quiconque le credo esthétique de Tarkovski selon lequel « le cinéma est un art sérieux et difficile, lourd de sacrifices ». Avec ses éclairages impressionnistes, ses rythmes lancinants et sa mise en scène sophistiquée, Sokourov pourrait être considéré comme le plus rigoureux des cinéastes actuels tant en documentaire qu’en fiction.