Tout se passe comme s’il y avait un équilibre secret et profond entre les troupes de l’art conformiste et ses voltigeurs audacieux. C’est là un phénomène de complémentarité bien connu en sociologie, où Claude Lévi-Strauss l’a décrit excellement: l’auteur d’avant-garde est un peu comme le sorcier des sociétés dites primitives: il fixe l’irrégularité pour mieux en purifier la masse sociale. Nul doute que dans sa phase descendante, la bourgeoisie n’ait eu un besoin profond de ces conduites aberrantes, qui nommaient tout haut certaines de ses tentations.
Propulsé par la presse québécoise, ovationné à la Mostra de Venise, le tant attendu Incendies de Denis Villeneuve est arrivé sur nos écrans le 17 septembre dernier, avec déjà la réputation d’être un chef d’œuvre. Retour sur le film et certaines “petites choses”, laissées de côté dans cette apologie massive.
Pourquoi revenir sur Polytechnique? Parce que l’énormité de « cette histoire » ne mérite pas de se clore aussi facilement : elle montre le degré d’aveuglement, d’abrutissement non seulement de la critique, mais des médias en général qui ont prouvé une fois de plus que ce qu’un film contient, ce dont il est fait, est absolument secondaire quand vient le temps de créer un « événement cinématographique ».