Être ou ne pas être ?

Déjeuner avec Hamlet

(avec l’aimable aide d’Etienne Pilon)

Le coup de vent adresse au peigne des reproches intéressés. Voilà comment faire ! Il le fait de remous timides qui laissent Étienne Pilon, la cible de sa critique, singulièrement ébouriffé. Étienne est acteur. Malgré les bénéfices collatéraux liés de nos jours à une apparence négligée, Étienne, de manière plus générale, a le cheveu élégant. Il a aussi un visage angélique, creusé par endroits et capable de générer beaucoup de douceur. Mais une certaine sévérité de caractère permet également à ses expressions, même les plus douces, de rebondir vers des compositions surprenantes. Il peut être habité de la fougue tout en jouant de son incertitude avec une contenance réfléchie et retenue. Cela est étonnant à voir. Sur la foi de votre bon goût, je vous le garantis. En ce soir de grands vents, dans un jardin de fleurs, nous parlons du doute, de l’indécision et de ses variantes. Nous parlons d’une irrésolution aux accents tragiques qui prend la forme d’un monologue, précisément, le plus célèbre de Shakespeare. Être ou ne pas être ? Nous en parlons, en buvant de la bière. Étienne le connaît par coeur ce monologue. Il peut même le réciter à l’envers, de la dernière à la première phrase. Il a d’ailleurs réussi cet exploit intoxiqué à la bière noire et, bien que ce facteur soit moins susceptible d’avoir influencé son interprétation, par un soir de pleine lune. Par un autre soir, celui de grands vents cité plus haut, Étienne et moi avons visionné les interprétations de ce monologue dans huit adaptations différentes de la pièce de Shakespeare.
-* Hamlet (1948) de Laurence Olivier qui interprète lui-même Hamlet. 1
-* Hamlet (1964) de Grigori Kozintsev dont le Hamlet est interprété par Innokenti Smoktunovsky, le Roi des acteurs Soviet. Une planète mineure porte son nom. 2
-* Hamlet (1969) de Tony Richardson qui a invité le ténébreux Nicol Williamson dans le rôle-titre. 3
-* Hamlet (1990) de Franco Zeffirelli avec Mel Gibson, après Mad Max, avant Braveheart. 4
-* Hamlet (1996) de Kenneth Branagh, le spécialiste de Shakespeare, avec lui-même. 5
-* Hamlet (2000) de Michael Almereyda avec Ethan Hawke, frais de ses 30 ans, le plus jeune de nos Hamlet. 6
-* Hamlet (2001) de Peter Brook. Adrian Lester est Hamlet. 7
-* Hamlet (2009) de Gregory Doran dont le Hamlet est interprété par l’énergique David Tennant. 8

Inspiré par la luxuriante décoration, je parle d’abord des interprétations dirigées par Laurence Olivier et Grigori Kozintsev qui sont les seuls à fournir à Hamlet un décor extérieur pour qu’il y déploie son chagrin méditatif. Je disais que Laurence Olivier est un tricheur habile. Vous direz comme Étienne qu’on ressent les effets du vent sur la manche d’Hamlet, mais je vous répondrai que vous confondez alors naïvement le vent et les grondements d’un ventilateur. Juste avant, Laurence Olivier nous prend par la main pour nous guider du théâtre au cinéma et imprime cette noble intention à un mouvement de caméra qui précède le monologue fulgurant.

Nous entrons dans la tête d’Hamlet.

La caméra se pose sur la calvitie circulaire d’Hamlet qui s’offre à nous comme un abîme ouvert sur son doute. Aïe aïe aïe, je voulais croire que cette offrande était la plus grande prouesse de son interprétation, ce mouvement de caméra, beau et précis, mais ici, vous m’accuserez avec raison de nager dans la mauvaise foi en me rappelant sagement, comme Étienne l’a fait, que le Hamlet interprété par Laurence Olivier n’est pas chauve. Mais pourquoi l’avoir imaginé chauve ? Aurais-je malgré moi joué de mes propres démons et trouvé dans le doute d’Hamlet le logis d’un réconfort où ruminer les craintes que je nourris à l’égard de ma propre calvitie, beaucoup plus certaine que celle d’Hamlet ? C’est bien possible. Je m’en excuse et je prends une autre bière. Pour polir mes insécurités, celle qui me lie par les cheveux à l’ultime repos, je me soustrais aux abstractions qui les auront vu naître et, pour me refaire une beauté, ne conserve de l’équation que ma fulgurante houppe d’antan à laquelle j’additionne mon visage d’aujourd’hui. Je froisse timidement la matière. L’humour m’écarte du chemin. Étienne, qu’en penses-tu ?

Étienne, le cheveu loyal, se questionne à voix haute sur la petite jambe pliée de Laurence Olivier et l’inévitable inconfort que cette pose devait occasionner. L’artifice n’est pas dans les interventions du vent inventé pour créer une impression réaliste et mesurer enfin l’indécision d’Hamlet à un paysage irréel, pour ne pas dire intérieur. Non ! L’artifice n’est pas non plus dans ce mouvement d’appareil qui reconduit le regard vers un espace plus introspectif et moins ambigu. Où est-il ? Pour Étienne, il est davantage dans cette petite jambe pliée. Ces gestes graissent le monologue d’un maniérisme inquiétant et pour Étienne et moi, nous en ressentons les énergies de la parole se dissiper considérablement. Les effets de la caméra qui cadre le Hamlet d’Olivier défendent pauvrement sa crainte d’être théâtral ou pire, celle d’être redondant et pénible. Le vent perd de sa clémence. Sommes-nous vraiment sur le bord d’une falaise ? Non, nous sommes très sérieusement en studio.

Ah ! Il vente plus sérieusement ailleurs, chez Kozintsev justement. Là, le monologue devient une méditation d’après-midi adressée à l’immensité de la mer, ce gouffre liquide ou cette balise formidable et furieuse, aussi rassurante et terrifiante qu’un miroir incassable. Voilà comment faire ? D’un Hamlet à l’autre, le vent a son mot à dire. Quand même, rentrons. L’automne est arrivé.

Égaré, je bondis plutôt vers Tony Richardson dont le Hamlet est définitivement chauve. Par la nature de mes soucis capillaires, la mission souvent inconsciente des apparences me fait douter tout à coup de ma capacité à percevoir du Hamlet interprété par Nicol Williamson, le plus chauve des Hamlet, les signes d’une vérité quelconque. Je m’en remets à Étienne qui est d’abord déboussolé par ce Hamlet surprenant. Il y a du froid et de la malveillance. Des traces d’orgueil exaspéré. Et cette proximité troublante qu’amplifie le décor épuré ? Oui, je dis qu’il y a tout ça pour mieux asservir les racines théâtrales de la fiction. Il n’y a aucune concession visuelle qui rendrait Shakespeare plus imagé et moins théâtral. Voilà un film dont les énergies se nourrissent pleinement du texte. Étienne l’accuse d’être théâtral, mais je proteste vivement ! Je crie et je m’arrache les cheveux que je fais semblant d’avoir. 9 Du monologue, je compare enfin avec Étienne les notes plus soutenues de l’interprétation de Laurence Olivier à celle de Nicol Williamson qui n’hésite que rarement. Il fait des feintes un peu secs, mais il est plus fougueux que douteux. Sans l’empreinte du jeu, la physionomie de Williamson annonce déjà le doute et la vulnérabilité. Il rend donc le texte de Shakespeare sans gêner de gravité ce que les mots portent déjà. Du coup, le soupçon théâtral est étouffé par l’engagement cinématographique de Tony Richardson envers la puissance d’évocation de la parole. Bravo Tony, tu es un brave !

ÉTIENNE
Chez Laurence Olivier, ce geste du bras qui brandit le couteau est étonnant de lenteur et de douceur. L’intérêt de l’interprétation de Laurence Olivier est probablement dans toute cette emphase, cette délicatesse qui se substitue à la précision pour faire résonner le doute et la fragilité.

À la question ultime posée au seuil du monologue, Laurence Olivier se permet une réponse sensible et muette. Le gain patient de sa valse avec la mort se traduit par un geste qui se coordonne avec sa pensée. Hamlet laisse tomber son couteau dans la mer. Il ne se tuera pas. Il préfère à la mort la souffrance de vivre. Le couteau est un objet fictif. Il le sait. Ce n’est pas sa présence palpable, mais bien le verbe qui donne vie au dilemme que le couteau est responsable d’incarner. Laurence Olivier et Kenneth Branagh ignorent pourtant cette évidence. Ils brandissent mollement le couteau comme s’il symbolisait le caractère décisif de toute action. J’ai oublié de le mentionner ? Vous retrouverez également le couteau dans la version de Kenneth Branagh, le plus blond et le plus onctueusement coiffé des Hamlet. Pourquoi ce couteau et ce miroir assez curieux qui est dressé pour réfléchir le trouble d’Hamlet ? Sa toilette soignée me laisse soupçonner que son Hamlet est pourtant le moins susceptible de se trancher les veines. Est-ce que je suis idiot de penser que l’apparence immaculée d’un homme le rend moins enclin au suicide ? Vous regarderez peut-être le visage des acteurs qui incarnent Hamlet en vous le demandant aussi ? Mais lequel pourrait aller jusqu’au bout du doute, dans le chemin sans soleil ? Certains vivants carburent à la certitude lorsqu’ils adoptent la posture du bonheur. Ils perdent alors en appétit et en curiosité ce qu’ils gagnent en sévérité et en notoriété. Mais hiver comme été, nuit et jour, nous apprenons que le monologue d’Hamlet a trouvé les signes de sa teneur dans quelques gestes hésitants. Une main fragile manie un couteau pour le diriger vers le coeur.

En 1921, dans une version muette, un carton résume l’interrogation. Le couteau est lourd, envenimé et libérateur. C’est un film muet, et c’est à lui d’être le messager des mots. Il est comme un gros camion sur une route sinueuse. Bon. Hamlet y est à la fois trop faible pour tuer et pour s’enlever la vie. Une précision étonnante. Dans ce film, la lumineuse Asta Nielsen incarne Hamlet au féminin. Hamlet est une femme élevée comme un homme afin de résoudre l’éventuel problème de succession. Je mentionne au passage une autre très belle invention de ce film. Le couteau, instrument du possible suicide d’Hamlet, appartient en fait à Claudius qui l’utilise d’abord pour tuer le père d’Hamlet et ainsi usurper son trône.

Ailleurs et plus tard, dans une Finlande grise, maître Kaurismaki transforme le couteau en un vulgaire coupe-papier avec lequel Hamlet s’épluche les ongles.

OLIVIER
Bien que j’apprécie l’interprétation de Williamson, j’ai beaucoup de difficulté avec sa voix. Elle ne rend pas aussi bien que celle de Lester ou de Tennant la musique de Shakespeare.

ÉTIENNE
Elle est nasillarde. Mais c’est intéressant, car c’est ce qui contribue à le rendre irritable lorsqu’il décide «d’endosser le manteau de la folie».

OLIVIER
Sa photogénie ?

ÉTIENNE
Un peu quelconque.

OLIVIER
Elle ne travaille pas en sa faveur. Je le vois comme une intention de Richardson. Il est de loin le moins aimable des Hamlet.

ÉTIENNE
Tu veux une Pabst ?

OLIVIER
Non merci. Je ne bois que de la bière noire. Sinon, j’aime que tout soit en son direct. Il n’y a pas de musique. Le dispositif est simple, presque agressant. Si on fait abstraction de sa voix, Williamson interprète le monologue avec une sorte de détachement qui n’est pas désagréable.

ÉTIENNE
Mais son détachement se transforme en nervosité. Comme si Hamlet réalisait les conséquences de son interrogation. Le monologue devient une lamentation timide et obscure. J’aime beaucoup. D’ailleurs, je trouve que physiquement Williamson personnifie bien le côté solitaire d’Hamlet.

OLIVIER
Je suis d’accord. Tout est un peu triste. L’humour de la pièce passe d’ailleurs très mal, avec un quelque chose de grinçant. Son mal de vivre est presque trop tangible. Ce Hamlet à hauteur d’homme est complètement épuisant. Il est beaucoup moins stimulant que le Peter Brook qui est pourtant beaucoup plus artisanal et épuré. Disons que le Richardson est d’un dynamisme satisfaisant, mais épuisant et morose.

ÉTIENNE
Est-ce que Williamson n’est pas trop vieux pour jouer Hamlet ? J’aime mes Hamlet plus jeunes. Plus naïfs. Il avait 33 ans ? Je l’imaginais plus vieux. On dirait qu’il a au moins dix ans de plus que sa mère. J’accepterais cette différence d’âge dans le contexte d’une production théâtrale, mais moins au cinéma.

OLIVIER
Si le cinéma avait une plus grande confiance dans la parole et son pouvoir d’évocation, je pense que tu l’accepterais au cinéma aussi.

Lorsque le Hamlet de Nicol Williamson lève la tête, son corps donne l’impression de se figer dans une contenance forcée et laborieuse. Il faut pourtant soupçonner, comme c’est très évidemment le cas dans les performances de Mel Gibson et de Laurence Olivier, que lorsque Hamlet lève la tête vers le ciel, il ne le fait que pour s’adresser à son Dieu. Le soleil est une sorte de réponse, mais hélas, il court dans la crypte ou sur les rochers surtout pour y chasser les insectes. Il y est aussi le seul habillement des squelettes. Mel Gibson est Hamlet. Franco Zeffirelli a réalisé la chose. Un professeur, même anxieux, ne serait pas trop embarrassé de la défendre devant des étudiants barbouillés du gris de leur impudence. Son interprétation du fameux monologue est tout à fait déroutante, éparpillée et curieuse. Si la mise en scène de Franco Zeffirelli y est fade, partout, Mel Gibson invente comme pour y remédier des points d’exclamation. Là où Franco Zeffirelli cherche, comme un auteur incertain, à affirmer sa présence en ponctuant la scène de quelques plans où les mots de Shakespeare dialogueraient avec les éléments principaux du décor, Gibson le met en échec à coup de fougue.

Comme c’est souvent le cas dans sa carrière, Mel Gibson est meilleur, ou du moins, plus intéressant que le film dans lequel il joue ou que le metteur en scène qui le dirige. Étienne sourcille devant cette affirmation. Je vois qu’il médite, consterné peut-être par l’appréciation qu’il en tire. Mel Gibson récite grossièrement, donnant l’impression de son impuissance en la mesurant à sa détermination comme à une funeste grimace. Il est si fébrile et incertain que sa composition risque de déborder du cadre à tout moment. Elle s’impose au découpage et en dicte même les variations. Il s’adresse à Dieu, à lui-même, à son père, au néant. Qui le sait ? Seulement lui. Je sais par contre qu’il en découle une fraicheur maladroite, tout à fait barbare, en tout cas, à l’image de la politique d’acteur de Gibson qui ne donne jamais dans l’intériorité. 10 Et lorsque Gibson évoque le continent inconnu d’où nul voyageur ne revient, Franco Zeffirelli croit pertinent – lire cinématographique – de nous montrer des squelettes. Franco Zeffirelli obéit au même principe pseudo-cinématographique qui force Laurence Olivier et Kenneth Branagh à brandir sensuellement un couteau lorsqu’il en est question dans le texte. Mel Gibson est un acteur pétillant de vitalité. En doutiez-vous ? La mort aura un poids plus définitif lorsqu’elle sera incarnée par la vie. À l’exception de Jésus qui agonisait pour mieux revenir, les mourants sont souvent délirants, moralisateurs ou ennuyeux. Est-ce le cas d’Hamlet ?

Est-ce qu’il faut vraiment parler de la version de Kenneth Branagh ? Allez, insiste Étienne. Tu as dit qu’il s’agissait d’une version sans fausse note. Oui, car le spectateur qui aimerait bien se faire surprendre est vite lassé par une aussi pompeuse entreprise. Il n’y a pas de surprises. Les gestes sont mathématiques. Tout répand l’odeur du calcul. Dans ce film interminable, nous goûtons le gras, quand même légitime, d’une assurance aussi indéniable que démesurée et j’en déclare Kenneth Branagh coupable de son ambition, de sa trop bonne connaissance de Shakespeare. Son travail d’adaptation est marqué par une pénible absence de distinction, ou du moins, d’une distinction qui se résume à son faste dérisoire. La fidélité y est trompeuse dans la mesure où elle réduit le relief que le travail d’adaptation permet. Elle est si lisse, cette adaptation, si fidèle, que j’ai envie de la taxer de paresseuse. Et le monologue ? Étienne me mentionne que Kenneth va rondement aux toasts. Et alors ? Je n’ai pas envie d’en parler. Je regarde le ciel. Je boude.

ÉTIENNE
On sent qu’il récite le monologue pour dresser les grandes lignes d’un défi qu’il doit verbaliser afin de le rendre plus concret. Il le fait avec une colère contenue et limpide. Il se parle pour se mettre au défi. Il a trouvé dans le miroir une astuce pour ne pas rendre le monologue trop théâtral.

OLIVIER
Tu veux dire qu’il joue de manière pompeuse ?

ÉTIENNE
Tu le trouves pompeux ?

OLIVIER
Tu as vu son allure ? Je le sens trop sûr de lui. Il y a de la brillantine dans ses cheveux ?

ÉTIENNE
Je pense que oui !

OLIVIER
Est-ce que Hamlet mettrait de la brillantine dans ses cheveux ?

ÉTIENNE
La question ! Tu es décidément obsédé par les cheveux d’Hamlet ! Tu le trouves donc trop propre ?

OLIVIER
Il est le prince d’un royaume pourri.

ÉTIENNE
À sa défense, un royaume d’apparence et de faux-semblant. Tout est lisse pour une raison. Mais je t’accorde que c’est un peu maniéré. Beaucoup même. Je ne déteste pas ça complètement, mais tout ce qui relève du décor, des costumes, du jeu avec le miroir, tout ça est un peu envahissant.

OLIVIER
Je n’apprécie pas l’emphase lorsqu’elle cherche trop à impressionner. C’est le problème de tout le Hamlet de Branagh. Il néglige la puissance des mots en les commentant visuellement. Incapable de simplicité, il s’essaye à déchiffrer des évidences. Dans le département de l’épique, Branagh n’arrive jamais à la cheville de ce que Kozintsev accomplit en quelques scènes. Pourtant, Kozintsev y arrive avec douceur, sans prétention, sans déclamer : je suis bruyant, me voilà !

ÉTIENNE
Tu préfères le Mel Gibson au Kenneth Branagh ?

OLIVIER
Bien sûr. Au moins, Mel Gibson lutte avec le texte. Son corps est engagé complètement dans un combat honnête. Il s’éparpille et il dégouline, oui. Il perd ? Très probablement. Mais il était désavantagé. Branagh est un spécialiste et son Hamlet est un déchet. À la défense de Branagh, l’année précédente, il réalisait pourtant un bijou nommé A Midwinter’s Tale dans lequel Hamlet était magnifiquement (et trop brièvement) incarné par Michael Maloney. Dans son déchet, Maloney est de retour, mais il joue Laërte. Pourquoi ?

ÉTIENNE
Il y a du gel dans les cheveux du Hamlet de Maloney ?

OLIVIER
Très bonne question ! Non, le budget du film était trop minuscule pour le permettre.

ÉTIENNE
Il racontait quoi ?

OLIVIER
A Midwinter’s Tale raconte les mésaventures d’un metteur en scène qui monte Hamlet dans une église à l’abandon un soir de Noël. Il produit la pièce d’une manière tout à fait artisanale. Il y a même une scène où les acteurs se plaignent de la durée de la pièce de Shakespeare. Le metteur en scène réplique qu’elle sera écourtée afin de la rendre plus concise.

ÉTIENNE
Voilà qui fait écho à la posture de défi qui marque l’interprétation de son monologue. Ce Midwinter’s Tale n’était que le terrain de jeu d’un projet moins modeste. Il y annonçait peut-être son Hamlet interminable ?

OLIVIER
Son travail d’adaptation, il ne l’a fait que pour Midwinter’s Tale. Je crois pourtant, comme en témoignent les versions de Peter Brook et de Michael Almereyda, que le plus grand service qu’on peut rendre à Shakespeare est justement de le trahir. Pour le classique des Hamlet, je me reporterai à la version de Grigori Kozintsev, la plus terrifiante et la plus épique. Pour la fidélité, je le relierai.

« À la seule exception de Fallstaff, tous les personnages de Shakespeare sont ce que l’on appelle des hommes enclins au mariage.» 11 Dans le cadre restreignant d’un monologue aussi riche que celui qui fait l’objet de ce texte, il aura été possible d’oublier qu’Hamlet est amoureux d’Ophélie. Avant de parler de celle qui sauve peut-être Hamlet du gouffre maudit, je me demande si tout le monde connaît le visage de l’inquiétude amoureuse ? Sûrement, oui. Cette expression si difficile à supporter. Vous la connaissez ? J’ai l’impression que tout le monde en connaît la saveur et la forme. Elle a une qualité universelle, capable de changer le cours des choses, de raisonner avec l’angoisse, d’inspirer le chagrin et la culpabilité, le doute et la mésentente. Peter Brook est un grand artiste. Remaniant la pièce, il retarde le monologue, le repositionnant à la toute fin du troisième acte, mais son invention la plus juste, il me semble, est qu’avant de le réciter, Hamlet voit Ophélie traverser son champ de vision, s’asseoir et poser sur lui le regard universel, celui de l’inquiétude amoureuse. L’expression d’Ophélie, modulée comme un cri d’amour, teinte l’interprétation du monologue qui en retour la documente pour en sonder toute la portée. Cette attention de Brook – l’affaire d’une coupe – recentre les enjeux plus certainement dans l’amour et dans la culpabilité. Les «natives couleurs de la décision» révèlent alors un abîme mental créé pour digérer les affres des possibles. L’espoir est blessé et sa plaie dévoile le sceau d’un anathème qui objective l’amour impossible, poussant au coin du vertige comme des lèvres hésitantes les mots qui s’essoufflent d’avoir été les instruments qui servirent à défier les commandements. Hamlet a tué Polonius, le père de la femme qu’il aime. Ne s’est-il pas ainsi condamné à la souffrance ? À bout de souffle, j’imagine Hamlet en arriver à la même conclusion que Cioran: Ce n’est pas la peine de se tuer puisqu’on se tue toujours trop tard. 12 Ce qui est important pour moi de dire ici, c’est que ces attentions de Brook (le regard d’Ophélie, le repositionnement du monologue et sans oublier, le fait que Lester est magnifique et bouleversant) permettent aux spectateurs d’être influencés différemment par la charge poétique des mots, ces mots qui font soudainement corps avec l’image, avec l’inquiétude amoureuse d’Ophélie, ce désormais fantôme qui hante la musique de Shakespeare. Ce regard de l’actrice et danseuse indienne Shantala Shivalingappa est si puissant qu’il précipite Hamlet à genoux, qui lui répond habité d’une lueur aussi jeune que sévère. Un feu ! Le feu se prête aux mots pour mieux peser le poids des actions, celles du passé, celles de l’avenir. Il enrobe le verbe avec des interrogations aux enfances sanglantes. Elles hantent ensuite le continent secret en donnant forme aux épreuves du présent, des épreuves auxquelles celles d’un ordre ancien s’agglutinent comme son cortège de lois organiques. La vengeance du père est le premier article. Il fait froid. La souffrance de vivre dans un noble acharnement est une espérance. À genoux, pour mieux contempler la servitude ou la mort, il observe aussi la chance sombrer dans un rêve immortel.

OLIVIER
Je trouve que Lester nourrit chaque pause d’une intensité assez douce et contrairement à plusieurs, il ne construit pas son monologue en crescendo.

ÉTIENNE
Il se détache de plus en plus du sens des mots, justement, comme s’il les pesait davantage, comme s’il doutait de leur valeur. Il y a une qualité «quotidienne» à son monologue… et même, je dirais… naturelle…

OLIVIER
Oui, il le fait avec une douceur très belle. Il médite. Sa colère participe à l’entreprise spirituelle qu’est sa vengeance.

ÉTIENNE
D’ailleurs, on ne doute jamais de sa colère. Il n’a pas besoin de la jouer. Il y a quelque chose qui bouillonne en lui… quelque chose qui appartient peut-être au territoire de la folie.

OLIVIER
Tu as dit qu’il était naturel.

ÉTIENNE
Tu trouves que c’est un mot horrible ?

OLIVIER
Je pense que tu as raison, mais j’ouvre une parenthèse, vous, les acteurs, si un réalisateur vous dit, après une prise, « peux-tu me la refaire plus naturelle » est-ce que vous roulez des yeux ?

ÉTIENNE
En fait, je comprends essentiellement ce qu’il veut dire, mais surtout, je trouve ça mignon. Hamlet, lorsqu’il dirige les comédiens qu’il engage, leur commande de dire les mots simplement, avec une langue déliée. «Ne gesticulez pas avec vos mains; fiez-vous à la nature, car le but du théâtre est d’être le miroir de nos vies.» Hamlet raconte comment dire et jouer la poésie. Je vous en prie, dit Hamlet, livrez le texte comme je l’ai écrit et comme je vous l’ai lu. Je le vois comme un hommage à la simplicité.

OLIVIER
Mais les acteurs sont orgueilleux. Ils aiment en faire beaucoup. David Tennant, par exemple, est impressionnant, mais il en fait énormément des grimaces et des singeries.

ÉTIENNE
Il y a une justesse à trouver même dans l’excès.

OLIVIER
Mel Gibson n’aurait aucune considération pour un tel conseil.

ÉTIENNE
Probablement.

OLIVIER
Dans la version de Peter Brook, qu’as-tu pensé du lent zoom avant qui accompagne la méditation d’Hamlet ?

ÉTIENNE
Sa simplicité y est jolie.

OLIVIER
Pour la simplicité, tu as donc aimé la version de Smoktunovsky ?

ÉTIENNE
Innokenti Smoktunovsky dégage une sobriété dans laquelle se mélangent parfaitement, à mon avis, la douceur et l’intensité du texte, le poids des enjeux.

OLIVIER
Je savais que tu aimerais !

David Tennant est à mon humble avis le plus énergique des Hamlet, le plus tragiquement drôle, le plus merveilleusement fou. Souvent les metteurs en scène, Branagh, Kozintsev et Olivier surtout, ont relégué l’humour de la pièce au dernier plan. Il ne devient que l’argument de la folie et de la ruse d’Hamlet. Il ne sera que rarement un aspect de sa personnalité, comme c’est heureusement le cas chez le Hamlet qu’interprète David Tennant. Mais même lui devient parfois très sérieux, car c’est sans couteau et sans épée que Tennant se déclare client d’une mort volontaire. Il y déploie cette mystique en deux plans. Le premier cadre Hamlet en plan moyen. Il est presque de dos. La caméra s’avance timidement, poussée par la curiosité, comme si de concert avec nous, elle surprenait dans l’éclat de la première interrogation – être ou ne pas être ? – une intériorité trouble qui mériterait une oreille attentive. Dans ce clair-obscur étonnant que la lumière du plan suivant, plus frontal, désamorce complètement pour exposer comme un nerf le trouble que les mots habitent, mots presque chuchotés, la caméra s’avance comme une oreille. Nous voilà bientôt dans le secret d’Hamlet. Dans le plan suivant, l’hésitation est double. De l’intérieur vers l’extérieur, elle se traduit par le regard d’Hamlet qui effleure l’axe de la caméra. Il le fait avec une assurance peut-être accidentelle. Contrairement aux apartés précédents, ce moment de connivence n’en est pas un. Il y a une résistance. Les mots nous privent de leur coopération. Rien n’y est aussi incertain que le tranchant du doute.

OLIVIER
Si tu devais jouer dans un film un monologue de cette teneur, est-ce que tu exigerais de savoir comment tu es cadré ?

ÉTIENNE
Le cadrage ne peut pas devenir un souci.

OLIVIER
Pourtant, je ne te dirigerais pas de la même façon d’un cadrage à l’autre. Je devrais t’inclure dans la conversation.

ÉTIENNE
C’est du cas par cas. Si je suis un acteur qui ne fait pas confiance à son réalisateur – toutes les raisons sont bonnes pour ne pas lui faire confiance – je risque de poser plus de questions. Souvent, en tant qu’acteur, on n’est pas toujours conscient de la ténacité de ce lien de confiance. Notre disponibilité s’évalue peut-être dans la durée. Sur un tournage, tous les jours sont différents et il y a un langage à trouver avec chaque réalisateur. Je pense, pour moi, que je préfère ne pas le savoir. Je préfère envisager le jeu de l’intérieur et non de l’extérieur. Je ne veux pas avoir la conscience de ce que je projette.

OLIVIER
Tu t’abandonnes complètement ?

ÉTIENNE
Oui.

OLIVIER
Quand on tourne ensemble, tu voudrais voir les rushs ?

ÉTIENNE
Avec toi, tu ne me les montres jamais. Mais en fait, je préfère ne pas les voir.

OLIVIER
Tu es tellement sage.

ÉTIENNE
Les acteurs veulent voir les rushs ?

OLIVIER
Les acteurs veulent tout le temps voir les rushs, non ? J’ai toujours été contre, jusqu’à ce que je travaille avec des non professionnels.

ÉTIENNE
Pourquoi ?

OLIVIER
J’avais l’impression que ça leur servait de matériaux pour rebondir vers autre chose, qu’ils avaient justement besoin de se définir en tant qu’acteurs avant tout de l’extérieur. J’ai trouvé aussi que ça pouvait aider le lien de confiance.

ÉTIENNE
Ils voient que tu ne filmes pas leur calvitie ou leurs pellicules ?

OLIVIER
Exactement.

ÉTIENNE
La version d’Ethan Hawke ?

OLIVIER
Hamlet porte une tuque. C’est original. Le monologue est travestit en commentaire.

ÉTIENNE
«Et on oublie jusqu’au sens du mot action… »

OLIVIER
Le monologue est narré alors qu’Hamlet fait les cent pas dans la section ACTION d’un club vidéo !

ÉTIENNE
Est-ce que c’est l’idée du siècle ?

OLIVIER
Les téléviseurs diffusent le film Le corbeau. Bien sûr que c’est l’idée du siècle !

ÉTIENNE
Ce Hamlet est de quelle année ?

OLIVIER
Il est de 2000 et il n’y a que des VHS !

ÉTIENNE
C’est vrai ! C’est comme une marche funèbre. Il récite le monologue dans un cimetière audiovisuel. Tu as raison, c’est l’idée du siècle !

OLIVIER
Un cimetière qui prendra des allures de tombeau lorsque les clubs vidéo seront complètement de l’histoire ancienne.

ÉTIENNE
Tu penses que c’est une intention… les VHS ?

OLIVIER
Le mot en évidence qui couronne chaque section est ACTION. Mais si tu notes attentivement le titre des films qui garnissent les étagères, tu remarqueras qu’il y a très peu de films d’action. On y voit The Third Man de Carol Reed, Cool Hand Luke de Rosenberg, The Star de je ne me souviens plus qui… 13

ÉTIENNE
Je dirais que les images nourrissent l’émotion que porte le texte. La version russe procède de la même manière. L’emphase n’est surtout pas dans le jeu. La réussite du monologue ne repose pas sur l’acteur, mais sur un tout. Est-ce que Ethan Hawke est un bon Hamlet ? Ça ne me semble pas avoir tant d’importance, surtout dans cette scène.

OLIVIER
Je suis d’accord. Ce n’est pas l’équilibre parfait qu’on retrouve dans le duo que forment Peter Brook et Adrian Lester. Ce Hamlet de Almereyda, je trouve, est formidable. Mais c’est définitivement Almereyda qui est responsable de cette réussite. Je pense sincèrement qu’Ethan Hawke est né pour jouer dans les films de Richard Linklater et qu’il ne devrait que s’en tenir à eux.

ÉTIENNE
Gattaca était bon !

OLIVIER
Gattaca ! Tu peux bien boire de la Pabst Étienne Pilon ! Ne me parle plus jamais de Gattaca !

ÉTIENNE
Gattaca ! Gattaca ! Gattaca !

OLIVIER
Aaaaahhhhh !

Le soleil se couche sur le jardin de fleurs et les grands vents qui jouaient admirablement avec les rênes du confort se taisent enfin. Des parfums de bière chatouillent encore les envies et la ténèbre s’est posée sur le coupant des rayons pour commencer un règne. Des formes lourdes comme des répliques de figuiers d’Espagne s’appuient sur des clôtures en bois résineux pour habiller correctement les ombres. Au revoir Étienne, je rentre en promenade et je médite, les mains dans le dos. Là-haut, une galante regarde un film avec des lunettes de soleil. Voyez ailleurs dans ma tête se bousculer les ménages possibles entre les forces vives des artifices du théâtre et du cinéma. Le vent est charmant. Les mots sont la matière et le carburant du sens et des énergies de l’histoire. Ils se passeront volontiers d’un couteau imprudent ou de l’image d’un squelette poussiéreux abandonné dans une crypte.

Victor-Lévy Beaulieu reproche au théâtre de Jacques Ferron de ne pas saisir les fondements du récit épique et contrairement à Shakespeare, de trop inscrire l’épopée dans la description. Même lorsque le doute est une donnée qui l’anime, le théâtre de Shakespeare va de l’avant. Fonce. Des futés et des croquettes diront que ce rapport à l’action est ce qui rend Shakespeare si adaptable. Malgré toutes les contradictions qui découlent de l’utilisation de cet adjectif, ils diront aussi que c’est ce qui le rend si «cinématographique.» En ce qui me concerne, je m’en remets à l’imaginaire qu’il stimule et aux bons mots de ce cher Victor-Lévy Beaulieu.

Pourquoi Shakespeare est-il un auteur aussi grand ? Parce que les mots, pour lui, primaient tout le reste et que, quand les mots priment tout le reste, c’est comme si on se retrouvait devant un grand pan de roc qu’on martèlerait d’un ciseau pour que ce qu’on y inscrit y reste à jamais. Devant ces mots-là, définitifs, chacun peut trouver sa liberté et l’interpréter à sa façon parce que, même martelés dans le roc, les mots vivent quand ils rendent compte de ce qui, même de l’instant, va plus loin que l’instant. Ce n’est donc pas pour rien si Shakespeare est le plus grand auteur dramatique de tous les temps: c’est qu’il croyait que le verbe, et ce qui s’exprime par-devers lui, est tout. Et le verbe, qu’est-ce donc? Le verbe, c’est la pensée, c’est tout ce qui s’imagine, c’est l’ensemble des idées qui font que le corps humain, peu importe où il se situe dans le temps et l’espace, peut avoir un sens, mais seulement à travers ce qui se dit en lui. Quand je lis Shakespeare, c’est ce qui me frappe: presque jamais de notes de scène, pas plus pour les costumes que pour les décors, pas plus pour ce que les personnages doivent être physiquement que pour ce qu’ils peuvent représenter moralement. Chez Shakespeare, c’est le verbe qui est la grande affaire parce que c’est lui qui détermine tout par ce côté tragique qui en marque le fondement 14 .

Dans une époque où le verbe au cinéma n’a décidément pas la place qu’il avait jadis, est-ce pertinent de tenter de convaincre quiconque qu’il est, au même titre que l’image, une donnée forcément cinématographique ? Si j’en fais mon affaire, que j’argumente en ce sens en couchant mes convictions cinématographiques dans des demandes de subvention qui trouvent asile dans la corbeille des décideurs, je ne suis pas plus avancé. Après tout, la parole n’est peut-être, comme l’enseignent les professeurs de scénarisation, qu’une petite béquille de buis sur laquelle les images reposent leurs chevilles artificielles. Que dire de tous ces films contemporains, aux esthétiques réalistes, ces produits d’une certification académique, ultimement, à la paternité aussi louche que rassurante, qui évitent la parole comme si elle n’existait que pour piéger l’image ? Que dire ? Moi, je ne dirai rien. Par contre, au lever du soleil, je tomberai dans un trou. Au fond du gouffre, je me serai bousillé la cheville. La lune m’a provoqué. Un nuage me la dérobe. Ah ! Le soleil trace la route du retour et je retrouve mon logis. Écrire en déjeunant. Je voulais commencer en paraphrasant un professeur de scénarisation et en vous laissant le soin d’enrober les mots des saveurs de l’assurance. Je me souviens très bien de lui. Derrière son pupitre dodécagone, suivant les préceptes de sa recommandation, il nous conseillait fortement de nous en tenir à des répliques qui ne dépassent pas trois phrases. Voilà sa petite règle d’or, son sésame de l’efficacité. Autrement, nous déborderions dans le territoire de la littérature et du théâtre. Nous ne serions pas cinématographique ! Malgré ce que les spécialistes de l’écriture scénaristique peuvent enseigner, le théâtre n’a pas l’exclusivité du monologue. Il est bien confortable au cinéma aussi. Que ce soit chez Paddy Chayefsky, Arnaud Desplechin, François Truffaut, Ingmar Bergman ou chez bien d’autres évidemment. Je vous dis donc que le monologue peut être cinématographique. Mais pour vous le dire, comme je ne suis ni professeur, ni spécialiste et qu’à titre de réalisateur, l’itinéraire discret de mes films m’interdit de gloser ou même de prétendre jouir d’un certain prestige auprès de vous, je le dirai à la manière d’un brigand qui s’en remet quand même à une glorieuse autorité : Rohmer.

Rohmer voit juste en affirmant que les mots sont des choses que l’on filme «au même titre que les visages, les paysages, les démarches, les gestes.» 15 Je peux éteindre le ventilateur. Les lumières avec. Il ne reste que celle que produit l’écran de mon ordinateur, toujours ouvert. Le vent matinal cogne à la fenêtre et la croix de l’oratoire est encore allumée. Le soleil se lève pourtant et je déjeune avec Hamlet.

Notes

  1. https://www.youtube.com/watch?v=5ks-NbCHUns”
  2. https://www.youtube.com/watch?v=1CmVVcHxrdo
  3. https://www.youtube.com/watch?v=co4PpiCbAxI
  4. https://www.youtube.com/watch?v=ei0fnP9s0KA
  5. https://www.youtube.com/watch?v=SjuZq-8PUw0
  6. https://www.youtube.com/watch?v=VMxAvnTaw7A
  7. https://www.youtube.com/watch?v=skNMOIvMSfQ
  8. https://www.youtube.com/watch?v=1u8OlUS7BhU
  9. J’argumente à la manière contemporaine. Si vous jouiez au basket-ball sur les terrains extérieurs de la ville où le vent influence la trajectoire du ballon, vous réaliseriez qu’on se passe d’arbitrage afin de mettre à l’exercice cette notion.
  10. Dans le making-of, lors du filmage de l’enterrement d’Ophélie, Franco Zeffirelli demande à Mel Gibson de rejouer la scène d’une manière plus intelligente et moins animale. Pauvre Franco ! Il faut mal connaître l’oeuvre de Gibson pour s’imaginer que ce dernier est en mesure d’adhérer à une telle demande.
  11. STEVENSON, Robert Louis, Virginibus Puerisque, France, Éditions Allia, 2003, 87 p.
  12. CIORAN, De l’inconvénient d’être né, Folio, France, 1973, 244 p.
  13. Stuart Heisler
  14. BEAULIEU, Victor-Lévy, Docteur Ferron, Québec, Stanké, 1991, 420 p.
  15. ROHMER, Éric, Le goût de la beauté, France, Flammarion, 1989, 343 p.