FNC 2021

Très cher Tsai

Montréal, le 19 novembre 2021

Très cher Tsai,

Ce soir, j’avais prévu de me rendre au cinéma, mais j’ai pris peur. Peur de traverser la ville pour m’enfermer seul dans le noir avant de rentrer comme souvent, le cœur sobre après avoir fantasmé, tout le jour, l’ivresse de la salle. Je me suis assis à mon bureau, j’ai mis un de ces albums qui accompagnent inlassablement mes soirées d’automne et puis j’ai été pris par l’envie de t’écrire. J’espère que si ces lignes te parviennent un jour, tu me pardonneras la familiarité que je m’autorise soudainement avec toi alors que je n’ai pas su te reconnaître avant notre troisième rencontre. Je voudrais te parler du FNC, de cette séance pendant laquelle je me suis autorisé à tomber amoureux. Mais avant ça, décembre 2020, un an déjà.

Vive l’amour, notre première rencontre oubliée

Sombre époque, début d’hiver en mesures sanitaires interdisant depuis des mois toute forme de cinéma. À sa place, ersatz pixelisés sur écran 15”, amas bancals de photogrammes délinéarisés concoctés par des programmateurs que je devine eux aussi tristes, tentatives vaines d’offrir une sensation distancée et déshumanisée de cet objet étrange, ce truc instable et dégoulinant qui porte, dévore, détruit, sépare, rassemble, scarifie, sacrifie, fait survivre. Entre les écrans de mon appartement, je finis par tomber sur toi. Un ami t’a amené avec lui, a insisté pour nous présenter.

Tu es caché sous le lit à épier le corps de cet homme faisant l’amour à une femme tandis que, la tête plaquée contre les ressorts du matelas, tu penses sa chair entre tes ongles, son souffle humidifiant l’épiderme de ton coup, les salives, la condensation et les sueurs, cocktail capiteux exsudant entre vos torses mêlés. Mais l’imposant meuble à coucher vous sépare, c’est le premier écran. Le deuxième, c’est celui que je détruis ici sans vergogne, entre le cinéaste que tu es et ce personnage sous le lit, incarné par celui dont j’ignorais alors le nom. Plus tard, j’apprendrai qu’il s’agit de Lee Kang-sheng, dont le visage, dans ma mémoire comme celles de beaucoup d’autres se confond au tien. Je t’ai effleuré sur mon téléviseur, mais ta caresse était distante, tes mots, tes images me sont parvenus ténus, étouffés comme si rien, rien ne parvenait à briser le dernier écran, celui qui retient mon corps entre les murs de l’appartement.

Toi aussi, dans le logement à louer qu’occupent les deux hommes et l’agente immobilière, tu courais après tes colères et tes désirs dans ces jeux de pièces qui me rappellent un proverbe d’Alfred de Musset. Dans l’acte unique qui constitue Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée (1845), un comte courtise une marquise qui se refuse et se donne à lui dans un jeu d’allers-retours lancinants, sorte de bourdonnement de paroles qui ne parviennent pas à se fixer, se refusent à entrer ou sortir, restent sur le seuil, prises dans le jeu sans fin des séductions amoureuses tourmentées. Dans l’immeuble de Taïwan, tu te percutes toi aussi aux parois sans parvenir à trouver refuge. Lee Kang-sheng n’a rien à faire là, il a volé la clé et personne ne lui a permis de faire de ces lieux les quartiers décadents de ses lubies homosexuelles. À vrai dire, il n’a rien à faire nulle part, dans aucun de ces lieux : il vend symboliquement des urnes funéraires, à la frontière de la mort, se tient à l’écart de la fête organisée par ses collègues, entre dans un restaurant plein, ressort d’un lieu vide. Tu étais, je crois, pris entre l’éros enragé, la lutte féconde, le refus de ces autres qui imposent, à la lisière des normes, là où s’abritent, faute de mieux, ceux qui craignent d’être à jamais bannis.

C’était en décembre, mais je dois t’avouer que j’ai très vite oublié les traits de ton cinéma. Quelques semaines seulement après le visionnement de Vive l’amour (1994), on me parlait de toi au détour d’une conversation et avec gêne, j’ai dû confesser n’avoir jamais vu aucun de tes films. Il a fallu que l’ami qui t’avait invité chez moi me ramène à la raison en me rappelant notre visionnement de Vive l’amour.

Je t’avais déjà rencontré sans que tu ne te fixes à la mémoire. Comme la porte de la salle de bain, ton cinéma entrouvert m’avait laissé deviner, dans l’entre brasure, des images qui échappent au souvenir. Je me demande, je n’en suis pas certain, si cette amnésie a quelque chose à voir avec un autre écran, celui de mon téléviseur, très clairement délimité par des contours qui m’empêchent d’entrer en contact avec le cinéma.

Goodbye Dragon Inn, le droit de déserter

Tsai, avant de poursuivre le récit de notre relation, j’aimerais éclaircir les raisons de la crainte qui m’a empêché ce soir d’aller au cinéma. Récemment, on m’a demandé combien de fois j’ai été bouleversé par un film et si j’ai souvent, comme beaucoup de cinéphiles, cinéastes, professeurs ou étudiants en cinéma, été confronté à la question absurde des « films préférés » à laquelle on répond machinalement « trop pour les citer » ou par un sourire gêné. Le choix du terme « bouleverser » m’a laissé sans voix. Je me suis tu un instant, plongeant dans les archives visuelles enfouies en moi. J’en suis sorti avec quelques reflets larmoyants, deux trois clichés de ma silhouette chancelante à des âges différents, tantôt dans la chambre de la maison parentale, tantôt au bord d’une route attendant un bus, ou marchant dans le froid de l’hiver montréalais. À ma grande surprise, ces images du bouleversement étaient bien moins nombreuses que je ne l’aurais espéré, tout juste une dizaine. Sur l’une d’entre elles, mon visage de 18 ans est bariolé de coups de pinceau à même le film, tracés reconnaissables parmi mille autres de Stan Brakhage. Une autre ne laisse voir qu’une paire d’yeux adolescents fixant le plafond dans le noir et dont la pupille devient surface de projection où défilent et se surimpriment les visages de Liv Ullmann et Bibi Andersson. Et puis là, mes membres qui s’effondrent sous la lumière cinglante d’un bidonville capverdien ou encore, à peine distinguables, mes mains tremblantes devant quelques images de la Palestine qui aurait dû s’appeler « jusqu’à la victoire ». Je vais t’épargner la liste exhaustive, mais je voulais te dire à quel point ces moments sont précieux. Une petite dizaine de bouleversements pour lesquels je peux sincèrement affirmer qu’ils m’ont transformé, que la personne sortie de la salle était toute autre de celle qui y était entrée.

Et puis la dernière de ces photographies est surplombée par ton ombre. C’était l’été, et ma paupière gauche bataille contre une larme en se remémorant l’instant où, toi aussi, tu es devenu l’une des figures habitant ma fragile mémoire de cinéma. J’étais, comme beaucoup, poursuivi par ces morts qui n’en finissaient plus, l’incertitude de ce lieu encore plus déserté depuis qu’un virus a décidé de fermer les espaces auxquels tu avais adressé en 2003 la plus belle des lettres d’amour, la plus lumineuse des oraisons funèbres. Alors je pense nécessairement à Jean Pierre Léaud — avec lequel tu as tourné Visage (2009), que je n’ai pas vu — et qui livre dans La maman et la putain (Jean Eustache, 1973) un monologue nous racontant le cauchemar d’un monde où le cinéma ne serait plus qu’un lointain souvenir. Cette disparition s’incarne dans Goodbye Dragon Inn (2003) qui condense tout une vie de cinéma. C’est celle de la génération qui me précède, la tienne ayant vécu cette fatale transition vers le numérique, cette énième fin du cinéma, renaissance hasardeuse vers un ailleurs trouble où l’on se noie et où tu es, parmi tant et si peu d’autres, un phare nécessaire.

Je pense aussi à ma cinéphilie, celle du téléchargement, mais aussi celle qui n’a su se réveiller qu’en découvrant la salle bien après le cinéma et qui ressent cette même peur de la mort, devenue colère à la fermeture des cinémas par des mesures arbitraires sur lesquelles il n’est pas nécessaire de s’étendre ici. Dans cette séance à la Cinémathèque québécoise, je regarde donc ce lieu déjà entièrement pris dans le cauchemar de Jean Eustache. Un acte de résistance nous a été retiré, celui de disparaître, de devenir des fantômes obscurs avachis dans des sièges rouges. Au revoir Auberge du dragon, là où l’on s’accorde, le temps de quelques coups d’épée, d’une cigarette et d’une femme monstrueuse qui grignote ses graines de tournesol, le droit d’exister, d’être profondément et absolument inutiles, c’est-à-dire non plus des outils, mais des agents autonomes qui se dérobent à la surveillance, se laissent vivre, s’écoutent bouger dans le noir.

Tsai, lors de notre deuxième rencontre, tu m’as murmuré que la mort était inéluctable, qu’il fallait parvenir à lui opposer un peu de vide pour construire — comme tous les amis qui nous ont précédés sous les projecteurs, derrière et devant, entre et autour — des lieux où la désertion reste un acte politique. J’ai compris, ce jour-là, que je ne t’oublierais plus. J’ai repensé à ton visage sous le lit et j’ai compris aussi la mélancolie qui m’avait échappé jusqu’alors. La femme monstrueuse avec ses graines de tournesol, c’est Yang Kuei-mei, elle était là aussi lors de notre première rencontre. Elle faisait l’amour sur le lit puis elle concluait le film en larmes, pleurant plan-séquence pour transmettre une émotion sans que je ne puisse en saisir les enjeux. Elle s’effondrait stoïque dans un anéantissement droit comme pour me dire qu’il y aurait toujours un écran entre moi et ces figures d’ombre et de lumière qui traversent la salle, quelque chose qui m’échappe, une réalité que je ne saisis pas, un drame sur lequel je n’ai aucun contrôle, une image à découvrir.

Je suis bouleversé.

Le titre original de Goodbye Dragon Inn se traduit littéralement par « Ne pas se disperser ». Tu nous invites à rester là dans les détails, nous satisfaire d’un siège, d’une salle. Ou bien, tu nous incites ironiquement à réaliser que dans cet espace clos, une centaine de voix et de mouvements infimes racontent mille récits qui, même en plein silence, se transforment en un brouhaha et contredisent l’injonction initiale puisqu’il est impossible de ne pas se disperser.

Je sors de la salle, j’ai un peu envie de pleurer, de disparaître aussi. Après le film, on me dit que tu t’es retiré à la campagne, que maintenant tu ne fais plus que du café. Je suis surpris un instant puis me souviens que tu viens de nous offrir collectivement, le droit de déserter.

Un doute

J’ai longtemps hésité à t’écrire. J’avais peur de m’adresser à toi alors que tant d’autres l’ont déjà fait et que nous nous sommes rencontrés il y a tout juste un an. J’ai pensé d’abord prendre le temps de consommer toute ta filmographie, en explorer chaque méandre pour t’écrire, si ce n’est d’égal à égal, en spectateur conscient pour éviter les erreurs d’interprétation. J’ai hésité longtemps, puis j’ai réalisé toute l’absurdité de mon geste. Quelques jours plus tôt, je racontais à un ami ce que m’avait fait Goodbye Dragon Inn et, alors qu’il me signalait son intention de regarder le film chez lui dès le lendemain, je l’ai vite ravisé. En commettant une telle erreur, il se priverait du bouleversement que pourrait provoquer une éventuelle projection. C’est fragile un bouleversement, fugace, imprévisible. Éternel aussi. Repensant à cet échange, je décide de supprimer le fichier mp4 de Stray Dogs (2013) de mon ordinateur, Walker (2012) également, ainsi que Les Rebelles du dieu néon (2015), que je crois avoir vu il y a quelques années (combien de fois nous sommes-nous rencontrés sans que je ne m’en souvienne ?). J’ai décidé de te garder et je sais que, même si tu décides de ne faire plus que du café, dans les années qui viennent, nous nous rencontrerons de nouveau. L’idée de recroiser tes images dans les salles de cinéma me calme.

En te rencontrant cette année, j’ai compris que je m’étais construit une montagne d’attentes et de craintes et que toute ma colère et ma frustration étaient aussi, quelque part, le résultat de ma propre interdiction à la désertion. Aujourd’hui, la cinéphilie se construit en listes sur des réseaux sociaux dédiés où les films s’évaluent en étoiles, où l’on tient un journal pour tenir à jour l’historique de ses visionnements. Et moi aussi, quelque part, je me suis laissé rattraper par un rapport consumériste, presque addictif aux images, à la recherche d’un peu de plaisir, du moindre fix. Pris dans la frénésie des listes — la volonté de voir tout ce que le temps nous permet de voir et de garder précieusement chacun de ces films consignés sur feuilles de papier ou pages web — j’avais laissé de côté la douceur des films qui s’effacent pour réapparaître en un succulent sursaut mnésique.

Si la mémoire est une force de résistance, il me semble nécessaire de l’éprouver et de ne pas trop s’adosser aux synapses synthétiques de nos notes confuses et de nos carnets numériques, préférer au contraire l’oubli pour espérer la sublimation d’une anamnèse.

Days, tu ne me quitteras plus

Et puis, notre dernière rencontre pendant cette édition 2021 du Festival du nouveau cinéma qui m’a conduit de déception en déception. D’abord, c’est la réalité d’un festival que l’on sait depuis longtemps avoir perdu son âme, mais qui ne se donne même plus la peine de faire semblant et se contente souvent d’introduire les films en mentionnant leurs sélections à Cannes ou à Berlin comme seuls arguments de programmation (à l’exception de la programmation Temps O, qui a le mérite d’être soutenue par un programmateur, bien que certains films soient présentés sans mot d’introduction). C’est, il me semble, le rôle de ces évènements de faire du cinéma une fête, un être ensemble, un Vive l’amour. Ici, on paye ses places à l’unité, pas de pass festival, c’est-à-dire pas de possibilité d’errer au hasard des salles et de découvrir, sans trop se ruiner, des films insignifiants, des pépites cachées entre deux grosses séances. Plus de désertion, à la place la colère grandissante. Tu sais Tsai, j’ai peur de ce cinéma. J’ai peur en tant que spectateur, mais aussi comme cinéaste de cette industrie dévorante qui ferme tous les espaces où les petits riens devraient survivre. Ces petits riens cachés sous le lit, tu as dû en être avant de te graver dans les mémoires et l’abandon toujours se tient sur le seuil de ma porte. Je refuse de le laisser entrer, il ne se décide jamais à partir. Reste-t-il dans ces salles quelques lieux où laisser émerger des paroles autres, celles qui n’attirent pas les masses, mais renverseront peut-être un·e ou deux inconnu·e·s ? Une enfant dans la chambre de ses parents, un adolescent au bord du gouffre, une femme seule un dimanche de brumaire.

Je l’imagine sortant du cinéma, iel titube sous la pluie, bouleversé·e.

Je n’arriverai pas ici à ajouter quoi que ce soit qui n’ait pas déjà été dit (par toi, par Eustache et tous les autres), mais je tenais à rappeler cette violence entre performativité critique du cinéphile, capitalisme de l’image et programmation frileuse. Rappeler qu’il y a dans ces gestes anodins l’inverse des disparitions, les effacements impérieux à l’origine de la rage fébrile qui m’accompagne alors que je me glisse dans le Cinéma Impérial presque vide.

Il est 14 h. Deuxième rangée comme souvent, personne autour. D’abord, l’incompréhension de ce plan à même le sol où l’on aperçoit une paire de jambes et un peu de fumée s’échappant d’un pot métallique. Et puis, le rythme de plus en plus lent et enfin, comprendre qu’il ne sera pas ici question de résistance, de colère ou de mort. Tout entier, Days (2020) se plonge dans un bain de rien comme le corps immergé de Lee Kang-sheng. L’eau du bain et les clapotis discrets qui bercent. Tsai, tu me dis là avec une franchise déroutante la beauté d’être, sans opposition ni affirmation, simplement être la plus légère des présences. Une journée auprès de cet homme dont l’homosexualité n’est pas une revendication, dont la vieillesse n’a rien de morbide, dont le corps a tout entier accepté de n’être plus qu’une caresse sur les objets qui l’entourent. Minutes entières à rincer la salade, boîte à musique vide de sens, pas plus symbolique que la douceur de sa mélodie. Days n’est pas ton plus grand film, il n’en a aucunement l’ambition. Tu m’as bouleversé l’autre jour et aujourd’hui tu m’accordes quelques images : la douceur d’un baiser où aucune lèvre ne se touche. Je m’enfonce dans le siège, mon souffle ralentit, les battements de mon cœur également, tandis que Lee Kang-sheng se fait masser, pendant quelques secondes, plusieurs minutes, d’interminables heures. Dans le cinéma, j’embrasse, les yeux à demi clos, la plus belle image qu’il soit de la résilience. Deux corps dans la tendresse d’un amour monnayé, mais qui échappent ainsi à tous les drames des sentiments déchirants, aux larmes et aux effrois de Vive l’amour, à la solitude frustrante de Goodbye Dragon Inn. Dans le cinéma, alors que mes muscles s’autorisent pour la première fois de l’année à se détendre dans le siège rouge, je sentirais presque ta main sur mon épaule et l’odeur de café.

J’ai tant cherché à être renversé cette année, à revivre le trouble du cinéma, à être transporté vers mille sensations incontrôlables que j’en ai cristallisé trop d’attentes, me plongeant dans une colère vindicative et plus néfaste que productive. J’ai fantasmé un cinéma de la résistance, me suis offusqué de voir dans les images le reflet d’un quotidien où sévissent les réalités qui heurtent, les regards et les corps. Mais j’ai lu tant de choses inacceptables, tu sais, des politiques asservissant le cinéma, et autant de films infâmes prenant l’affiche, de cinéastes fascistes, d’artistes violeurs, de diversités tokenisées, de cinémas gardés ouverts, mais dont les rideaux sont tachés de sang… La résistance, je crois, n’a pas de fin, elle se constitue en un équilibre précaire où l’on essaye, d’une parole à l’autre, de trouver quelques espaces paisibles, des lueurs passagères d’espoir.

En t’écrivant ce soir et en repensant à la douceur de cette séance, je réalise que plus que le bouleversement, j’ai toujours chéri l’apaisement qui le suit. Au mieux les coups de foudre transportent, mais ce n’est que dans la sérénité et le calme que se construisent les émotions sincères, que naissent les amours, oserais-je dire « véritables ». Je t’ai oublié en colère ; endeuillé, tu m’as bouleversé ; puis, je t’ai aimé dans la résilience.

Une chanson d’amour

Au début de ma lettre, je t’ai parlé de chansons d’automne, et je voulais te laisser sur la traduction de ces paroles qui te disent un peu de l’amour que je te porte à toi, Tsai, pas l’homme que j’ignore, mais le conteur que j’ai rencontré cette année, et dont je me suis laissé tomber amoureux au cinéma Impérial.

Raconte, ô conteur
Raconte une histoire, qu’elle soit une légende
Parle-nous des gens d’antan
De Loundja, la fille de l’ogresse et du fils du Sultan

Commence par “il était une fois”
Offre-nous des rêves
Commence par “il était une fois”
Chacun d’entre nous a une histoire au fond de son cœur

Raconte, oublie que nous sommes grands
Comme si nous étions des enfants
Nous voulons croire à toutes les histoires
Parle-nous du paradis et de l’enfer
De l’oiseau qui n’a jamais volé
Donne-nous le sens de la vie

Raconte, comme on t’a raconté
Sans en rajouter, sans en enlever
Prends garde, nous avons une mémoire
Raconte, fais que l’on oublie notre réalité
Abandonne-nous dans ce “il était une fois”.

« Raoui » — Souad Massi, traduit de l’arabe.

Tendrement,

Samy Benammar