VISIONS/RÉFLEXIONS

murmure : « bruissement léger, prolongé ». À propos de The Violence of a Civilization Without Secrets (2018)

Ce texte est présenté dans le cadre de la série RÉFLEXIONS, développée et produite par VISIONS. RÉFLEXIONS met l’oeuvre d’un cinéaste en dialogue avec les pensées, réactions, interprétations, idées libres d‘un·e écrivain·e. Le film The Violence of a Civilization Without Secrets d’Adam Khalil, Zack Khalil & Jackson Polys (2018), sur lequel porte ce texte, est accessible en ligne sur le site de VISIONS.

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archéologie : « du grec archaia, ancien, logos, discours, récit ».
anthropologie: « théorie philosophique qui met l’homme au centre de ses préoccupations ».
culture : « ensemble des phénomènes matériels et idéologiques qui caractérisent un groupe ethnique ou une nation, une civilisation, par opposition à un autre groupe ou à une autre nation ».

Creuser la terre, faire parler les objets // les restes humains, éclairer les civilisations sur leur histoire et leur devenir.

La violence du passé colonial ressurgit, fosses communes.

La violence moderne, faire perdurer la violence coloniale. Exhumer ceux qui ont été inhumés, il y a 9 000 ans. Démembrer, étudier, reconstituer. Exhiber les corps enfermés derrière les vitrines muséales, « botanique de la mort ».

La science fait taire les fantômes, parle pour eux. Étouffe les ombres, néglige les absences.

La parole résiste, se faufile dans les séquençages ADN. Murmure l’histoire inaudible, celle de la domination.

Le monde moderne subsiste, par ce processus de domination. D’une civilisation contre une autre, d’un peuple contre un autre, d’une race contre une autre.

Objet//sujet – preuve//témoignage – écrit//oral – blanc(s)//rouge(s)

Regards sidérés, corps démembrés arpentent les dédales des musées, se regardent regarder, scrutent leurs bustes dé/re/composés, séparés de leurs corps.

Corps//objets, histoire ré/écrite à leur dépens.

Squelette et crânes dansent, vertige des ancêtres.

La transmission ne peut se réduire au discours, à la monstration. Aux sons qui couvrent les silences, aux images qui brulent les souvenirs.

La science ressuscite, redonne la mort. Son langage chiffre les visages, ne peut y lire le sujet. Sa trace échappe aux sens, subsiste par son secret. Cachée à ceux qui ne peuvent voir, dérobée à ceux qui ne savent écouter. Ce qui fait battre le cœur, rythme le devenir.