Deux vases communicants (Les Photos d’Alix)
La photographie est : comme se déshabiller devant le médecin(savoir) ; l’amant (le don) ; la société (la séduction, l’uniforme). Et cependant la forme spécifique de la conversation à trois termes qu’est la confession doit avoir son équivalent visuel 1 .
Alix Cléo Roubaud
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De (nostalgia), réalisé en 1971 par Hollis Frampton et dont il est un remake hypothétique mais infiniment plus érotique 2 , Les Photos d’Alix conserve l’extrême rigueur de composition. Une stricte alternance de plans entre les photos d’icelle, imperturbablement filmées en plongée (plans pairs), et les deux individus qui les regardent, les manipulent, les commentent, les interrogent, sans jamais vraiment les décrire ; moins encore, les épuiser (plans impairs).
Soixante-quatorze plans. Dix-neuf photographies. Deux personnages qui devisent et qui, devisant, font l’expérience de ce qu’est voir ensemble : l’œil qui observe, la main qui montre, le cœur qui écoute. Et des gestes autour de ces images, incessants, comme des mouches. « Comme un bourdonnement autour de notre vocation à nous décomposer 3 ».
Mais qui, au juste, regarde ces images ? L’un est modérément curieux, mais visiblement intrigué : plus piqué au vif que pris au jeu. Il interroge un monde qu’il sait ne pas comprendre. L’autre badine et joue le mystère, amusée, prend plaisir à se livrer à demi-mots à ce jeune homme qui, elle le sait, ne la comprendra pas. Mais parce que, dit-elle, « les seules vraies photographies sont des photographies d’enfance », c’est dans le regret de l’enfance qu’ils s’abîment ensemble sous l’œil de Jean Eustache, père de l’un et ami de l’autre qui, pour autant, jamais ne renonce à être cinéaste, c’est-à-dire l’ordonnateur de cette fragile liturgie : mouvements des mains, mouvements des yeux, silences concentrés, silences de provocation ou de gêne 4 .
Mais que sont, au juste, ces photos d’Alix ? Une seule, la première, est accrochée au mur, verticalement et dans l’axe de l’objectif, occupant d’emblée le centre du plan. Entrant l’un après l’autre dans le cadre, c’est debout que Boris et Alix la regardent, face à face et face à elle, à égalité avec l’image, pris avec elle dans une autre image, en mouvement, celle du plan liminaire des Photos d’Alix, images conversant avec d’autres. À hauteur d’image, comme on dirait à hauteur d’être humain.
Passé ce moment de coprésence, ou dessiné devant nous ce triangle équilatéral, le film ne fera que tracer des diagonales, lacérer l’espace, et constater l’ampleur de l’abîme qui s’ouvre, de plan en plan, entre pairs et impairs. Pourtant, Les Photos d’Alix est peut-être l’un des seuls films à être rigoureusement composé d’une moitié de plans filmés en plongée, presque zénithale, de telle sorte que même lorsqu’ils ne seront plus face aux images mais penchés sur elles, plus face à face mais côte-à-côte, le cadre défini par Eustache placera toujours les photos d’Alix en état de verticalité sur le plan de l’écran, nous laissera toujours à hauteur d’image. Quant aux plans impairs, qui nous donnent à voir ces personnages sages comme des images, ils alternent – semble-t-il – sans rime ni raison entre deux types d’axes : frontal ou, le plus souvent, de biais (parfois à gauche, légèrement ; souvent à droite, plus franchement). Un tel parti-pris de cadrage ne peut que rendre les bords de chaque plan saillants, coupants comme des éclats de verre.
Dans ce dispositif qui ordonne de façon rigoureusement égalitaire le rapport entre l’espace des images qui regardent, et celui des images regardées ; entre moi qui les regarde et elles qui me regardent, prolifèrent des questions sans importance : « Qu’est-ce que c’est, cette photo ? Mais il y a un trucage, là ? Et c’est où ? C’est à Paris ? Et pourquoi des photos comme çà ? Où est-ce, cette fenêtre ? Qu’est-ce que c’est ? » Questions sans importance auxquelles font écho des réponses sans signification : « C’est mon mari. Ça, c’est un ami à moi. Oui, oui. Ce n’est pas un tableau, c’est un homme réel, qui est là. Elle est fort obscène. Comme quoi une photographie peut être personnellement pornographique tout en étant publiquement décente. Le soleil est là, et par artifice je l’ai couché, si je puis dire. Ça m’amusait […] de déplacer le soleil. C’est un corps qui est, je suppose, le mien. Mais glorieux. C’est une photographie assez morte. Mais enfin ça n’a pas beaucoup d’intérêt, comme les photos elles-mêmes. Je pense que j’étais très défoncée. Je l’avais prise parce que c’était en quelque sorte son empire. C’était un pub très très très anglais. C’est l’Angleterre, l’Angleterre. Une sorte d’orthogonalité […], cette grande distance douce. Une photographie de rupture. Un homme que j’aimais beaucoup. Et puis au centre de l’image, cette grande traînée noire. La clarté d’une lampe. J’ai séduit quelqu’un avec cette photographie. »
En dépit de ce qu’annonce son titre, trompeur comme souvent chez Eustache, et aussi obscur au fond qu’il semble transparent en surface, Les Photos d’Alix n’est pas un film « sur » les images. Pas en tout cas sur leur conception, ou le souvenir qu’on en garde ; ni sur les circonstances de leur fabrication, les formes qu’elles manifestent ou même le plaisir qu’elles nous donnent. Les Photos d’Alix n’est pas un film sur l’image, mais un film sur la parole-en-l’image. La parole en état d’urgence, la parole en son état le plus incandescent : contrariée, difficile, menteuse ; séductrice, impossible, empêchée. Pas la métaphore, l’allégorie, le symbole, mais l’image (de film) qui emboîte, intrique et finalement accueille l’image photographique et cette parole dont elle est l’occasion, le prétexte, ou mieux : la circonstance, en un geste de mise en scène qui ne la théâtralise pas tant qu’elle ne la projette sur le plan de l’écran. Un geste essentiellement d’hospitalité.
Entre Boris et Alix, c’est d’abord la relation aux images qui diffère, si profondément qu’elle conditionne des régimes de présence au monde amenés à s’entre-dévorer. Boris regarde les images. Il les regarde sincèrement, si ce n’est intensément, et cette sincérité ouvre l’espace du questionnement. Il dit, ces images, je ne les comprends pas, et demande à celle qui les a faites de les lui expliquer. Mais poser la question ainsi, c’est tomber dans le piège tendu de concert par le cinéaste et la photographe. Parce que « La connaissance du réel est une lumière qui projette toujours quelque part des ombres 5 », chaque requête d’éclaircissement ne lui ouvrira que des espaces toujours plus remplis d’obscurité. Cette obscurité qu’il recrache, qu’elle fait luire, et que le cinéaste avale, derrière sa caméra.
Alix ne regarde pas ses images. Pas vraiment, puisqu’au moment de les faire déjà elle a regardé le monde intensément, et s’en est faite mal au cœur. Alix a le regard tourné en elle-même : non pas vers ses souvenirs, mais vers la tentation du monologue et le plaisir sans jouissance d’un savoir aussi repoussé qu’informulé.
Ce ne sont pas ses photos qu’Alix regarde, mais l’incompréhension de Boris. Là est la jouissance, et c’est ce mélancolique engrenage que filme Eustache : d’abord, en affûtant de plus en plus ses plans, en redoublant le tranchant de leur alternance, entre des photos qui ne disent jamais rien d’autre qu’elles-mêmes ; et des personnages entre lesquels la proximité cède le pas à la distance, l’un passant de la volonté de savoir à la lassitude de ne pas comprendre, l’autre aux yeux pétillants du trouble qu’elle sait savoir provoquer en lui. « Tu n’as pas vécu », c’est au fond tout ce qu’Alix dit à Boris dans ce côte-à-côte où la mise en scène les installe, et que le montage maintient obstinément séparé de la vie turbulente qui a fait voir le jour aux photos d’Alix. Un film dont on pense qu’il va ouvrir un dialogue, qu’il est un dialogue, et qui ne sait rien d’autre que constater la progression de son délitement. Et un cinéaste, un ami et un père, qui filme cela avec la plus grande des tendresses et la plus glaçante des cruautés (comme Maurice Pialat, dont La Maison des bois avait été projeté quelques années plus tôt à la Cinémathèque française, et dont la légende dit qu’Eustache en était sorti les yeux rougis de larmes). Un film dans lequel les personnages ne changent pas de place, qui commence dans la proximité, peut-être même la complicité, et se poursuit dans le constat mat d’un irréductible écart. Un film qui commence dans l’intimité du 1,37 et se transforme en CinémaScope. Un film où entrent des courants d’air. Un film où peu à peu il fait froid.
Film devenu sans partage. Film vide et silencieux en son plein cœur, en dépit de son bavardage qui siffle comme du bois mouillé sous un feu battu d’avance. Film dans lequel les trois plans les plus éloquents sont peut-être le trente-neuvième, le quarante-septième et le soixante-septième, trois plans brefs qui sont les seuls dans lesquels pas un mot n’est prononcé, mais où tout peut résonner. Deux plans légèrement obliques, un de face.
Et puis des plans pairs, des plans sur les photos d’Alix, et de leur entrelacement avec les autres, que dire ? Un regard un peu attentif sur la continuité spatiale et temporelle, et sur le bref générique du film, révèle au moins deux choses. D’abord, qu’il a demandé le concours d’un réalisateur (Jean Eustache), d’une seule personne au son (Bruno Charier 6 ), mais de deux à l’image (Robert Alazraki 7 et Caroline Champetier 8 ). Fallait-il être deux pour filmer les dix-neuf minutes des Photos d’Alix, tournées dans un seul décor, en intérieur et en plans fixes ? Faut-il supposer qu’il y avait une personne à l’image sur les plans pairs, et l’autre sur les plans impairs ? Une sur les photos d’Alix et l’autre sur ceux qui les regardent, les manipulent, les commentent, les interrogent, sans jamais vraiment les décrire ; moins encore, les épuiser ? Le cas échéant, les deux séries ont-elles été tournées au même moment ? La mise en scène des plans pairs le laisse difficilement supposer. Parce que si l’on voit bien la main droite de Boris qui y désigne, et la main gauche d’Alix qui y papillonne 9 , le point de vue rend impossible la présence de la caméra au moment même où on les voit converser dans les plans impairs. C’est donc que dans ces derniers, il a fallu faire de la place pour mettre la caméra entre eux, et qu’elle filme littéralement à leur place. Au lieu d’eux, et à un autre moment. Ainsi le dispositif qui règle la mise en scène des Photos d’Alix n’est-il pas seulement égalitaire, mais aussi ubiquitaire.
Il y a encore le ballet des raccords, tirés au cordeau, de la couture oblique et droite entre l’espace et le temps du pair, et de l’impair. Il n’y a vraisemblablement pas eu de scripte sur Les Photos d’Alix, et personne n’y est mentionné au montage, dont il faut supposer qu’il a été effectué par Eustache lui-même. Si les gestes semblent raccorder au premier abord, une vision plus attentive met vite en échec ce spectre de continuité ourlé par la parole, qui rampe de plan en plan. Les raccords de gestes accusent des retards, des bégaiements, font apparaître dans les mouvements des mains une série de lapsus ou de mensonges. Un geste amorcé dans l’un tarde à se concrétiser dans le suivant. Dans un plan la cigarette d’Alix est intacte et, l’instant d’après, consumée en partie. Politique discrète mais obstinée 10 du faux-raccord qui accuse la distance et creuse l’espace, comme un insecte fouisseur. Mensonge du son qui nous chuchote ce que nous avons envie d’entendre, un récit de vie à travers des photographies 11 , tandis que l’image se désespère de montrer ce qui est, mais que nous ne l’écout(i)ons pas vraiment. Film dans lequel il faudrait écouter l’image et voir le son, film disant la vérité sur le mensonge qu’il nous donne à voir, à l’œuvre, en plein travail et que, comme Boris, nous ne savons pas voir nous non plus, quand bien même nous le soupçonnons.
Eustache a pourtant laissé des traces de son numéro d’illusionnisme. Des indices pour que nous puissions entendre et voir, comme un codicille. À partir du trente-quatrième plan, et comme tout au long de (nostalgia), son frère, image et son achèvent de se déchirer 12 . La parole, qui s’affranchissait déjà de son lien à l’image, se pose sur des photos qui ne lui correspondent plus, ne les désignent plus, ne les racontent plus, ne les concernent plus. C’est alors elle seule qui compte : la parole d’Alix, pâteuse, faussement blasée, et l’écoute toujours attentive de Boris, qui jamais ne se décourage. Deux voix échappées de corps incomplets, qui donnent substance à ces images en déshérence. Peut-être est-ce là le prix de leur liberté, et de la nôtre, dans ce film qui ne semblait construire que des formes de captivité. Alix le dit dans les plans suivants, quand bien même elle fait mine de parler d’autre chose : « ce sont des choses futiles, vides, laissées, périssables, qui vont disparaître ». Et peut-être se consume-t-elle de le savoir, et de ne pouvoir l’empêcher, quand lui, ne le sachant pas, y oppose sa détermination à croire que les images rédiment, réparent et soignent. Simplement parce que, et Simone Weil le savait, « la foi, c’est l’expérience que l’intelligence est éclairée par l’amour 13 . »
Mais par un court-circuit saisissant, Alix aussitôt ajoute : « c’est donc une photographie sentimentale. […] Mais toutes les photographies sont sentimentales », et : « Bizarrement j’ai pris cette photographie à un moment où j’allais très très mal. » Cet aveu de faiblesse est en réalité une marque de confiance, et de courage, qui balaie l’ironie bravache de la photographe, et neutralise la cruauté du cinéaste qui avait comme Pialat, comme Garrel, une caméra à la place du cœur 14 , pour ne plus laisser place qu’à la tendresse. Cet aveu les sauve : in extremis et pour la première fois, Boris sourit. Ce n’est pas le sourire en coin d’Alix, c’est un sourire discret, et de compréhension profonde. Un sourire entendu, mais sans la moindre trace d’ironie. Un sourire au premier degré dans un film où tout est porté au carré. Un sourire conjurant toute hyperbole. En une phrase prononcée, en un geste du bout des lèvres, la suture est faite, et l’écart soudainement résorbé. La complicité est revenue, et Alix peut dire : « voilà, c’est tout. » Ils sont devenus, au sens propre, des vases communicants : lui, encore plein d’espace pour accueillir des histoires sombres et des aveux tristes, sans se laisser obscurcir ; elle, déjà trop pleine, mais avec peut-être un grand besoin d’espace en-dedans d’elle-même pour respirer. Et c’est ce que filme Eustache, avant de partir sur la pointe des pieds.
Longtemps j’ai cru qu’Alix Cléo Roubaud s’était suicidée. Elle a, en réalité, succombé à une embolie pulmonaire survenue le 28 janvier 1983, aux premières heures du jour. Elle souffrait depuis l’enfance d’un asthme sévère, et de difficultés respiratoires.
Dans une lettre non envoyée, dont on ne connaît pas le destinataire, elle écrivait deux ans plus tôt : «Lorsqu’autrefois je devais expliquer à quelque jeune personne comment on savait combien de temps il fallait pour arrêter une photo, je disais qu’il fallait attendre qu’elle (la photo) ait fini de chanter : et en effet, quand on plonge une photo révélée dans le bain d’arrêt – d’acide acétique – après vingt secondes, on entend une agence de bulles monter en glissando de ré à si environ, puis redescendre et dépérir ; le cas échéant j’ajoutais qu’il fallait attendre que les bulles aient parcouru l’octave. Rien de tout cela n’est vrai, enfin tout est vrai sauf la jeune personne 15 ».
Le même jour, 16 juillet 1980, elle écrit dans son journal : « Dîné avec Jean qui déclare devenir fou à force de monter le film; qu’il n’a jamais eu de travail si ardu 16 . »
Jean Eustache s’est donné la mort le 5 novembre 1981, en plein cœur de la nuit. Quelques semaines plus tard, le 23 janvier 1982, Les Photos d’Alix est diffusé à la télévision française, où il est vu par près d’un million de personnes. Le 27 février de la même année, lors de la septième cérémonie des Césars, le film reçoit le César du meilleur court métrage de fiction.
Notes
- Alix Cléo Roubaud, Journal 1979-1983, Paris, Seuil, 1984, p. 129. La ponctuation de cette édition est ici respectée. ↩
- Premier film de la série « Hapax Legomena », (nostalgia) repose sur un protocole voisin à bien des égards de celui des Photos d’Alix. Le film est composé d’une suite de treize plans filmés en plongée zénithale. Chacun d’entre eux représente une photographie prise par Frampton, commentée par une voix d’homme (celle de Michael Snow) qui, en un récit à la première personne, associe le contenu de l’image à des souvenirs liés au passé du cinéaste, et souvent aux circonstances de sa réalisation. Chacune de ces photographies commence à brûler au bout d’une quarantaine de secondes, puis se consume entièrement, laissant apparaître sous (ou derrière) elle une plaque chauffante constituée de résistances électriques disposées en cercles – sans doute celle de la cuisine de Frampton –, sur laquelle la photographie était posée depuis le commencement de la prise de vue. À compter du moment où le contenu de la photographie devient indiscernable, la voix cesse de la commenter, la laissant se désagréger en silence. Enfin, à l’instar de ce qui se produit à partir du trente-quatrième plan des Photos d’Alix, la relation entre son et image est biaisée dès le début de (nostalgia) puisque l’on constate d’emblée que le commentaire semble ne pas correspondre à la photographie que l’on a sous les yeux. Mais ce stratagème est rapidement éventé, puisque l’on réalise en voyant le deuxième plan que c’est sur lui que portait par anticipation le commentaire accolé au premier, puis sur le troisième que porte le commentaire associé au deuxième, etc. La dimension érotique sous-jacente aux Photos d’Alix est manifeste, tandis qu’elle semble à peu près inexistante dans (nostagia). Néanmoins elle existe, mais de façon plus théorisée, chez le cinéaste étatsunien : voir Hollis Frampton, « Paradoxes érotiques pour appareil photographique », Trafic, n° 10, printemps 2014 [1985], p. 101-106. ↩
- J’ai lu cette phrase il y a bien longtemps, mais j’ai toujours été incapable d’en retrouver la source, et une fois encore en achevant ce texte. Je soupçonne fortement qu’elle se trouve quelque part dans un texte de Jean Louis Schefer. ↩
- Si le dispositif faussement neutre qui ordonne le film sue partout la présence d’Eustache, comme on le verra, ce n’est pas seulement derrière mais aussi devant la caméra qu’il s’y inscrit. La seizième photographie commentée par Alix et Boris le représente en effet [voir plus bas], sur la gauche du cadre et dans son profil droit, observant au côté opposé une personne dont le poing dissimule en partie le visage, mais qui pourrait être son fils Boris. En plein cœur de cette image se trouve la main du cinéaste et comme émanant d’elle, une clarté impossible, telle une Annonciation de Georges de La Tour, telle la lumière de mort qui sourd de la boîte mystérieuse dans un film d’Apocalypse (En quatrième vitesse, Robert Aldrich, 1955). ↩
- Gaston Bachelard, La formation de l’esprit scientifique – Contribution à une psychanalyse de la connaissance objective, Paris, Vrin, 1960, p. 13. ↩
- Qui avait déjà assuré la prise de sons pour La Rosière de Pessac. ↩
- Qui avait déjà assuré la direction de la photographie pour La Rosière de Pessac. ↩
- Robert Alazraki et Caroline Champetier avaient déjà participé l’un et l’autre au tournage de Trop tôt/Trop tard de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub l’année précédente, mais chacun sur l’un de ses deux segments. ↩
- « Hâte-toi, dit l’insecte, et rend à cette fleur hommage de l’ivresse qu’elle te donne. » Jean Louis Schefer, « Usage de l’insecte », Figures de différents caractères, Paris, P.O.L, 2005, p. 153. ↩
- Et peut-être, involontaire. Mais en l’espèce ça n’a aucune importance. ↩
- Conformément à ce qu’indiquent le synopsis et la note d’intention publiés dans le n° 34 de la revue Trafic, été 2000, p. 141-143. ↩
- Jérôme Prieur raconte (Ibid., p. 141) que lors d’un atelier d’initiation à la vidéo suivi à l’INA, Jean Eustache avait réalisé un exercice très similaire à ce qu’allait devenir Les Photos d’Alix. Selon Prieur – qui en écrira le scénario avec Sylvie Blum –, une désynchronisation accidentelle de l’image et du son survenue lors de cet atelier donnera au cinéaste l’idée de reprendre volontairement le procédé à la moitié du film. ↩
- Simone Weil, La pesanteur et la grâce, Paris, Plon, 1988 [1947], p. 207. ↩
- Philippe Garrel et Thomas Lescure, Une caméra à la place du cœur, Aix-en-Provence, Admiranda/Institut de l’image, 1992. ↩
- Alix Cléo Roubaud, 1984, p. 44. ↩
- Ibid. ↩